Avec Paul Ambroise et Fylicia Côté.
Ce projet examine comment les journalistes indépendants négocient les tensions entre le travail productif et le travail de soins (care work). Il mobilise une approche féministe-marxiste, à savoir la théorie de la reproduction sociale, pour donner un sens aux expériences de vie et de travail des journalistes indépendants dans le capitalisme contemporain. La méthode utilisée consiste en des entrevues longitudinales qualitatives avec des journalistes au Canada et en Europe.
Premièrement, cela permet d'identifier le journalisme comme une institution de soins, ou de reproduction sociale. Cela recadre sa crise dans le cadre de la crise plus large de la reproduction sociale aujourd'hui (plutôt que de l'identifier comme crise de l'industrie de l'information mettant en danger la démocratie). À cause de cette crise, les journalistes indépendants doivent constamment poursuivre des activités non journalistiques bien rémunérées pour pouvoir continuer à effectuer un travail journalistique sous-payé – ce qui brouille la frontière entre travail productif et travail de soins dans leur poursuites professionnelles. Deuxièmement, la théorie de la reproduction sociale articule les « déficits de soins » dans leur vie privée, liés aux revenus faibles ou imprévisibles, à la garde des enfants, à la sécurité sociale et au logement. Troisièmement, la théorie de la reproduction sociale rend visible une alternative cohérente aux modes de vie et de travail capitalistes, basée sur diverses activités apparemment informelles de collaboration et de coopération dans lesquelles les journalistes étudiés s'engagent. Celles-ci mêlent production et reproduction, activités professionnelles et privées, activités économiques et sociales, pointant vers ce qui peut être décrit comme une forme d’« anarchisme latent ».